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2014/03/02

Erico Verissimo : Le Temps et le Vent (T1, Le Continent)

« Au Brésil il y a peut-être des romans aussi grands que Le Temps et le Vent. De plus grands je n'en connais pas » (Jorge Amado)

ENORME !! Que ce soit du Brésil ou d'ailleurs, de plus grands romans que Le Temps et le Vent (tome 1), je n'en connais pas non plus. D'aussi grand ? Peut-être Vie et Destin, du russe Vassili Grossman. Deux histoires se déroulant en des lieux et des temps différents, mais deux auteurs assez semblables par cette extraordinaire capacité qu'ils avaient à animer leurs personnages en les dotant d'une âme, d'un souffle, de caractère et d'appétits, au point de les rendre tout bonnement humains. Aussi ce même talent à faire surgir en quelques mots quantité d'images dans l'esprit du lecteur : il suffisait en effet à Grossman ou à Verissimo d'évoquer par exemple une cheminée, plus cinq ou six morceaux de bois secs, pour qu'aussitôt vous entendiez le feu crépiter, tout en sentant sur votre peau la chaleur de ses flammes. Enfin, autres points communs entre les deux écrivains nés à cinq jours d'intervalle, leur intérêt pour l'histoire, leur intelligence de la vie et surtout cette toute petite chose qui leur donnait un peu plus de poids sur terre : une conscience morale.

Il est difficile d'expliquer ce qu'est Le Temps et le Vent sans énoncer d'abord quelques chiffres :

  • 13 : le nombre d'années qu'Erico Verissimo a consacré à la rédaction de cette trilogie (débutée en 1948, achevée en 1961).
  • 2250 : le nombre de pages constituant l'ensemble des trois tomes (dont seulement deux ont été traduits jusqu'à présent).
  • 6 : le nombre de générations se succédant durant le siècle et demi couvert par le premier récit (entre 1745 et 1895).

Ni sans citer son épigraphe, tirée de l'Ecclésiaste :

Un âge va, un âge vient, mais la terre tient toujours. Le soleil se lève, le soleil se couche, il se hâte vers son lieu et c'est là qu'il se lève. Le vent part au midi, tourne au nord, il tourne, tourne et va, et sur son parcours retourne le vent.

Ou les quatre premières lignes par lesquelles l'auteur nous plonge à son tour dans l'immuable et universelle vanité des choses :

C'était par une froide nuit de pleine lune. Les étoiles scintillaient sur la ville de Santa Fé, si déserte et si calme qu'on l'aurait prise pour un cimetière abandonné. Si absolu était le silence et l'air si léger qu'on aurait pu entendre le serein tomber dans la solitude [...]

S'ensuit une histoire dont on ne peut guère donner qu'un bref aperçu tant les péripéties sont nombreuses et variées. Savoir que toute l'action du roman se déroule dans le Rio Grande du Sud, mais qu'au niveau de sa construction temporelle elle se présente sous la forme d'un constant va-et-vient entre passé et présent — le premier éclairant peu à peu le second de manière très cinématographique —, l'ensemble étant, de plus, méthodiquement entrecoupé d'une sorte de chant à la façon des tragédies grecques antiques. Donc très élaboré.
Savoir aussi qu'à travers cette saga familiale c'est tout un pan de l'histoire brésilienne qui nous est ici raconté : de la conquête de Rio Grande par ses primo-habitants jusqu'à la guerre civile de 1895, en passant par celles de l'Indépendance, de Farroupilha, de Cisplatine, de la Triple Alliance, aussi l'abdication de l'empereur, l'abolition de l'esclavage, l'immigration européenne, les épidémies de peste, de choléra... le temps qui passe et qui emporte les hommes, comme le vent la poussière.
Savoir encore qu'au niveau symbolique, éros et thanatos sont figurés par une vieille paire de ciseaux et un poignard au manche d'argent, l'une et l'autre se transmettant de génération en génération : les ciseaux pour les filles, elles couperont avec le cordon ombilical de chaque nouveau-né, et le poignard pour les gars, ils en useront comme en usent tous les garçons, c'est là leur patrimoine, avec aussi leur nom, leur caractère et leur physionomie hérités de leurs lointains ancêtres.
Et savoir enfin qu'une fois qu'on a dit tout ça du bouquin, on n'en a presque rien dit, tellement... tellement il est ENORME.

Erico Verissimo (1905-1975)

 Extraits :

Aux alentours de 1765, la rencontre entre Ana et Pedro l'indien, à l'origine de la lignée Terra-Cambarà :

[...] On entendait au loin la flûte de Pedro. Ana se sentait les yeux lourds, la tête vide, le corps moulu et endolori, comme si elle venait d'être battue. Elle regarda dehors mais ne put supporter l'éclat du soleil. Des mouches bourdonnaient en voltigeant. Un âne pleureur commença à braire au loin.
- Je crois que je suis malade, murmura-t-elle.
- Ce doit être tes affaires qui arrivent, lui dit sa mère, les bras plongés dans l'eau graisseuse.
Ana ne répondit pas. Elle continua d'essuyer les assiettes. Le son de la flûte aggravait la sensation de chaleur, de lassitude, de malaise.
- Si au moins il s'arrêtait de jouer, murmura-t-elle.
Elle ne prononçait jamais le nom de Pedro. Pour en parler, elle disait "lui" ou "cet homme".
- Laisse-le, le pauvre, répliqua la mère. Il est si seul, faut bien qu'il s'amuse un peu.
Ana était inquiète. Au fond elle savait de quoi il s'agissait, mais elle avait honte et aurait voulu penser à autre chose. Impossible. Le pire était de sentir la pointe de ses seins (le seul contact de la blouse la faisait frissonner) et son sexe comme trois foyers ardents. Elle savait ce que cela voulait dire. Depuis l'âge de quinze ans, la vie n'avait plus de secrets pour elle. Durant ses insomnies, elle s'interrogeait sur ce qu'on ressentait à être embrassée, baisée, pénétrée par un homme. Elle n'ignorait pas que c'étaient là pensées indécentes, qu'il fallait chasser. Mais elle les avait bel et bien dans la tête et dans le corps, et rien au monde ne pourrait lui faire avouer à personne, ni à sa mère, ni à la statue de la Vierge, ni au curé en confession, les choses qu'elle sentait et désirait. Et maintenant, là, dans la touffeur de midi, sous le son de cette flûte, elle était possédée comme jamais du désir de l'homme. Elle pensait aux chiennes en chaleur et se dégoûtait elle-même. Le souvenir du taureau couvrant une vache lui causait un fourmillement de honte par tout le corps. C'était encore le désir. La faute en était à la canicule. Elle pensa aller se baigner. Mais non. Après le repas c'est mauvais. Et puis il aurait fallu marcher jusque là-bas dans la fournaise. Le trou d'eau était comme un lieu interdit, un danger. C'était Pedro. Pour y arriver, elle devait passer devant sa cabane. Il risquait de la voir.
L'eau devait être fraîche. Ana y plongea en pensée. Elle sentit les lambaris lui frôler les jambes et les seins. Et puis voilà la main de Pedro qui se glissait sur ses cuisses pour les caresser, molle et ondulante comme un poisson. Quelle honte ! C'était le mâle qu'elle voulait. Et si elle pensait à Pedro, c'est que, mis à part son père et ses frères, il était le seul homme ici. Seulement pour cette raison. Puisque, en vérité, elle le haïssait. Elle pensa à ses lèvres humides collées à la flûte de bambou. Aux lèvres de Pedro sur ses seins. Cette musique sortait du corps de Pedro et pénétrait son corps à elle... Oh ! mais elle le détestait ! Il était sale. Il était mauvais. Tout en le haïssant, elle ne pouvait détacher sa pensée de son corps à lui, de son visage, de son odeur, elle ne pouvait pas, ne pouvait pas, ne pouvait pas.
- S'il s'arrêtait de baiser ! — réalisant qu'elle avait dit : baiser au lieu de jouer, elle rougit et se troubla.
Elle laissa tomber une assiette qui heurta le sol avec un bruit mou. Dona Henriqueta, inquiète, lui dit d'aller se coucher. Sans un mot elle se dirigea vers son lit.

Une lettre de septembre 1855, adressée par le docteur Carl Winter à l'un de ses compatriotes allemands :

« Mein lieber baron, quatre ans aujourd'hui que je suis à Santa Fé. Je ne porte plus le chapeau haut de forme, mes habits européens tirent à leur fin, et, hélas, je m'adapte peu à peu. J'en tire une impression de décadence, de dissolution, de dépersonnalisation. Bientôt, tel un pauvre caméléon, j'aurai la couleur de mon habitat. Je me suis fait au maté, bien que je déteste cet amer breuvage. (Peut-on comprendre les contradictions de l'âme humaine ?) Je vivais chastement, faute de femme que j'aimasse ou qui voulût coucher avec moi. Mes songes érotiques étaient peuplés de femmes blondes et je devais me contenter de ces amours oniriques, maintenant, mon cher, il arrive que mon esprit chancelant cède aux appels de cette chair faible — qui, soit dit en passant, reste très maigre sur ses os — et que j'attire dans mon lit des filles faciles, des Indiennes et même des mulâtresses. Après ces orgies, je sors mon violon et je prends un bain de musique. Ou alors, j'ouvre mon Heine et je m'inonde de poésie. Puis, pendant mes longues semaines de chasteté, je reviens à mes vagues rêveries de femmes blondes et germaniques. Ah ! mon ami, je suis le personnage d'un drame que Goethe n'écrirait jamais, un drame qui n'apporterait la gloire à personne, parce qu'il est sordide, vide et sans contenu. Mais c'est plutôt une comédie. Pourquoi je reste ici ? Pourquoi ? Je ne sais. Quelque chose m'attache à cette terre. Ni affection, ni amour. L'habitude. L'habitude est comme une épouse que nous n'aimons plus, que nous détestons désormais, mais à laquelle nous sommes collés par force... L'habitude, et la paresse. L'inertie, Carl, a de la force. La routine est une fade ballade aux rimes éculées.
La vie ici est monotone. Il n'arrive rien. De temps à autre on m'appelle pour un homme étripé dans un duel, pour une affaire d'honneur, une querelle aux courses, aux cartes, aux osselets. Même cela, c'est de la routine. Un intestin ressemble à un autre intestin ; les réactions sont toujours les mêmes. Les patients supportent les remèdes sans crier. On n'est jamais d'accord pour savoir qui a commencé, qui a tort.
Il apparaît rarement une tête nouvelle. Les jours se ressemblent. Le courrier arrive une fois par semaine, quand il arrive. Une charrette met une éternité pour aller à Rio Pardo et en revenir. Les gens sont bons, dans l'ensemble, mais d'une bonté un peu sèche, rugueuse. Les sujets de conversation limités. On parle bétail, chevaux, troupeaux, hivernages, nourriture, terres, ou alors bagarres, guerres et révolution passées ou à venir.
Ah ! j'allais oublier de t'apprendre une grande nouvelle. Lucia, ma Melpomène, a eu un fils. Elle l'a appelé Licurgo, non qu'elle admire le chef spartiate, mais parce que (elle me l'a avoué avec un sourire angélique) ce nom a une sonorité sombre, dramatique. Bien vu : Licurgo, c'est vraiment un nom de la nuit. On ne m'a pas appelé pour l'accouchement. Ils ont préféré une vieille négresse aux mains sales mais expertes. Je m'en suis réjoui, car pour rien au monde je n'aurais voulu voir ma muse de la Tragédie dans cette conjecture tragi-grotesque. Je l'ai vue tout de suite après. Elle était plus belle que jamais et irradiait lumière et bonté. Oui, bonté, Carl. Après tout ce que je t'ai dit d'elle, ça a l'air absurde. Mais c'est ce que j'ai senti. A ce moment, mein liebe baron, je l'ai aimée. Je l'ai aimée tendrement pour la première fois, et cet amour a duré exactement le temps que j'ai passé dans cette chambre qui sentait l'encens. Elle n'a pas de lait. On a fait venir une Noire de l'estancia pour allaiter. Le père, l'orgueil le rend jobard. La grand-mère, si elle est contente, sait cacher ses sentiments sous un masque de pierre.
[...] Changeant de sujet, je dirai que les hivers rigoureux de Santa Fé m'ont révélé une mixture délicieuse que mon cher baron doit déjà connaître. C'est la cachaça, avec du miel et du jus de citron. Positivement divin ! Si on te raconte, Carl, que je suis mort ivre dans un caniveau de Santa Fé, tu peux le croire, à la réserve près qu'il n'y a pas de caniveaux à Santa Fé, pour la simple raison qu'il n'y a pas de chaussées comme il n'y a pas de réverbères, comme, en dernière analyse, il n'y a rien. C'est peut-être cette absence de tout qui me fascine et me retient.
[...] Envoie-moi, quand tu le pourras, livres et journaux. Même périmés, car dans ce bourg oublié des dieux et des hommes, je me persuade chaque jour davantage que le temps, en fin de compte, n'est qu'une invention des horlogers suisses pour vendre leurs coucous. Envoie des livres, ou je vais oublier l'allemand. J'ai relu mille fois mon volume de Heine. Mon Faust est hors d'usage parce que la belle Gregoria l'a laissé tomber dans l'eau de la lessive.»

En 1895, une discussion amicale au cours de laquelle s'entremêlent gaiement l'herméneutique et les pâtés en croûte :

Le père Atilio Romano avait devant lui une assiettée de pâtés, qu'il dévorait avec une telle fougue qu'il lui arrivait de les enfourner entiers dans sa bouche. Il mastiquait vaillamment et en même temps continuait de parler car le Dr Winter, cet athée incorrigible, ne le laissait pas en paix. En ce moment, il lui récitait par cœur des passages d'un livre de son ami von Koseritz, autre hérétique de male mort. Le buste incliné sur la table, la fourchette en bataille, le médecin fixait le père tout en parlant :
- « Le Plus croyant d'entre vous va-t-il croire que la Terre soit le centre de l'Univers et que Soleil, Lune et les autres astres n'aient été créés que pour servir de lampions ? »
Le vicaire l'écoutait, souriant et mastiquant.
- Et pourquoi pas ? interrompit-il. Pourquoi pas, si Dieu l'a voulu.
Il se carra sur sa chaise et demanda à une Noire de lui apporter des pâtés, puis, les lèvres luisantes de graisse, les joues colorées, l’œil joyeux, il revint au médecin.
- Et pourquoi pas ?
Winter brandissait toujours sa fourchette.
- « La Bible est l'oeuvre d'ignorants ; l'histoire de la création est un mythe. Laplace avait raison quand, à Napoléon qui lui demandait pourquoi il ne parlait pas de Dieu dans son système de mécanique céleste, il répondit : "Sire, je n'avais pas besoin de cette hypothèse." »
- Quos Deus vult perdere, prius dementat, cita le père en lâchant un rot bienheureux.
- « L'état des couches terrestres montre à l'évidence que l'homme est le fruit de l'évolution de la matière, comme la Terre elle-même, comme tous les mondes qui peuplent l'univers. »
Atilio Romano savourait son vin, le gardant sur la langue pour ensuite l'avaler avec une sensuelle lenteur. Il remplit de nouveau son verre.
- Rien de tout cela n'est nouveau pour moi, docteur. Tous ces auteurs athées, vos amis, je les connais. J'ai leurs livres à mon chevet, preuve que je ne les crains pas.
- Et vous ne trouvez pas qu'ils ont raison ?
- Tout à fait ! Ah ! Voici les pâtés chauds. — Il se frotta les mains — Servez-vous, belo !
Le Dr Winter ne se laissa point émouvoir par les pâtés qu'on apportait devant lui, dodus, odorants, saupoudrés de sucre et de cannelle. Il leur jeta un regard froid et revint à son interlocuteur :
- Mais si vous trouvez qu'ils ont raison, pourquoi continuez-vous à exercer le sacerdoce d'une religion basée sur un mythe puéril ?
La grosse main du père avança et ses doigts agrippèrent un pâté.
- La raison n'a rien à voir avec la foi !
Et, ayant enfourné le pâté, il l'enfonça avec les doigts.
- Vous avez lu Darwin et Lamarck, n'est-ce pas ?
- Je les ai lus, et peut-être mieux que vous.
- Vous acceptez les lois de l'évolution et de la sélection ?
- Je les accepte.
- Alors ?
- Alors quoi ?
- Comment pouvez-vous reconnaître, en même temps, l'autorité de la Bible ?
- La Bible parle dans un langage symbolique, belo !
- C'est un sophisme !
- L'hypothèse évolutionniste n'exclut pas Dieu nécessairement. Elle est plutôt une preuve de la suprême, incomparable, subtile et imaginative intelligence du Tout-Puissant. — Il essuya avec la pointe de sa serviette ses lèvres graisseuses — La Bible n'est qu'une version poétique de la genèse, à la portée de l'intelligence du peuple.
- C'est de l'hérésie, père !
- Personne n'est plus autorisé qu'un père pour proférer une hérésie, belo ! s'exclama le vicaire en riant aux éclats.
Le Dr Winter secoua la tête en riant de son rire de fausset. Il regarda son interlocuteur avec sympathie. Il admirait le père Romano. Il avait connu d'autres vicaires à Santa Fé : certains peu instruits qui vivaient dans la terreur sacrée de déplaire au chef politique local. Ils ne lisaient pas et avaient peur de discuter. Maintenant Santa Fé avait un vicaire indépendant, exubérant de santé et de bonne humeur, un libéral, et, si absurde que cela paraisse, un libre-penseur. Il possédait chez lui une riche bibliothèque où Winter, ravi, trouvait dans de belles reliures en cuir certains de ses auteurs favoris : Renan, Schopenhauer, Diderot... Un des livres de chevet du vicaire était le Candide de Voltaire. Un jour, Winter avait surpris le père à lire les contes de Boccace, avec d'homériques éclats de rire.
- Le vicaire qui lit Boccace ! s'était-il exclamé, stupéfait.
Fermant le livre avec fracas et se levant en sursaut, le père avait expliqué :
- Je lis ce vaurien pour deux puissantes raisons. Primo, parce que j'aime ça. Secundo, parce que ses histoires matérialistes et paillardes me font mieux apprécier les délices de la chasteté et de la vie spirituelle.
Le père était en général estimé dans sa paroisse. Il savait raconter une anecdote, et, pasteur aimable, ne passait pas son temps, comme ses prédécesseurs, à menacer ses ouailles des feux de l'enfer. Quelqu'un a-t-il péché ? On va voir, asseyez-vous, mettez-vous à l'aise, reposez-vous un peu. Ne craignez rien. Tout cela peut s'arranger. Dieu est bonne personne. Ouvrez-lui votre cœur, bela. Allez ! J'écoute.

Erico Verissimo : Le Temps et le Vent - Le Continent (1949)
Traduction française : André Rougon (1996)
Editions Albin Michel

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