« On critique souvent ce qu'on
n'aime pas... parce que ça a pris la place de ce qu'on aime »
- Bonjour
!
- Enchanté
!
- Comment
va ?
- Des
hauts et des bas...
- Eh ben
v'là un p'tit r'montant !
- Du Jurançon ?
- De l'AOC
!!!
L'ambiance avait été comme d'habitude un peu bohème,
à la bonne franquette, et l'espace si confiné que les plus improbables des
couples s'étaient rapidement formé de-ci de-là : au coude-à-coude ce soir-là le biker
tatoué et la quadra BCBG, le vieux prof à la retraite et l'ancien des
Baumettes, l'ermite du Val d'Oise et l'anar de Montreuil... Combien étaient-ils
? Oh, pas aussi nombreux que pour un concert des Stones ou une bénédiction
papale, c'est sûr, mais suffisamment quand même pour qu'un observateur attitré ne
sache plus trop où donner des yeux et accorder des oreilles. Ici on causait cinéma,
science et littérature, là on alignait les calembours et les contrepèteries
tout en convertissant des terabytes en pétaoctets, et partout on évoquait
France Culture, tantôt pour l'encenser, tantôt pour casser du sucre, c'est plus
rigolo :
LES MATINS DE FRANCE CULTURE
Elle : Marc Voinchet c'est drôlement pratique : il
fait l'horloge parlante !
Lui : Il est 6h46 et nous fêtons aujourd'hui les
Jean-Louis...
Elle : Mais c'est vachement pratique, si, si ! Parce
qu'un matin j'ai mis France Musique : un concerto de Chopin, très doux, très
calme, très beau... eh bien je me suis rendormie.
Lui : Et puis, avec Marc Voinchet, ceux qui ont des
enfants savent si c'est l'heure de faire chauffer les biberons ou bien de
changer les couches.
LE GAI SAVOIR
LES NOUVEAUX CHEMINS DE LA
CONNAISSANCE
Elle : Je dois dire qu'Adèle est beaucoup moins bien
que Raphaël dans les Nouveaux Chemins de la Connaissance...
Lui : Venant de toi le contraire m'eut surpris.
Elle : Outre qu'il est plus efficace et plus précis,
il a une telle culture littéraire qu'il est capable de vous citer les Fleurs
du Mal quasiment en entier...
Lui : Et écoutes-tu le Gai Savoir, le
dimanche après-midi ?
Elle : Parfois, oui, quand j'ai du ménage à faire...
Lui : Enthoven y fait un numéro absolument
hallucinant avec la pisseuse qui l'accompagne...
Elle : Paola-machin-chose ? Ça fait vingt ans qu'elle
est en khâgne, elle va redoubler jusqu'à quand ?
LES PIEDS SUR TERRE
A : J'ai écouté aujourd'hui les Pieds sur Terre,
une rediffusion de 2012, avec Sonia Kronlund : Il faut diiiire que dans cette
viiiille le Front National a connu un record de 40,3%.... Soit ! Seulement,
cette bonne femme, qui est soi-disant journaliste de terrain et
d'investigation, n'a même pas été foutue de retourner dans cette ville depuis
2012. Moi je les aime bien ses petits reportages, mais ce qui est vraiment
insupportable c'est la musique de fond digne des Feux de l'Amour censée
t'amener vers la compassion ou la détestation, sans parler de cette morale à
deux balles qu'elle te sert en début et en fin d'émission...
B : Si on prend l'émission dans son projet
idéologique, elle est en effet méprisable mais...
A : C'est peu de le dire !
B : ... mais il y a un tel travail, et une telle
captation de la réalité, qu'elle sera toujours intéressante et même estimable
malgré ses défauts. Si on va poser ses micros en banlieue avec une idée déjà dans
la tête et qu'on fait son montage toujours dans le même sens, eh bien il y a un
moment où on ne se renouvelle plus.
C : Humm... excusez-moi de vous interrompre, mais vous
relevez uniquement ce qui est mauvais ?
B : Oui, oui, ça fait partie du travail, j'insiste
là-dessus.
C : Alors, pardon d'être vulgaire, mais moi j'ai surtout envie d'aimer et de dire que j'aime !
A : Je suis d'accord ! Moi aussi je préfère défendre
ce que j'aime, mais Brice Couturier, par exemple, je ne le supporte plus non
plus, ce type qui donne des leçons sur tout et n'importe quoi, qui nous délivre
ses avis avisés et euhhh... lumineux, ouhlala !
LA
CHANSON FRANÇAISE
- Anecdote de collectionneur : "Comment ?
Vous vouliez les Tino Rossi de chez Columbia année 1933 ? Oh, quel malheur, on
en a fait des semelles la semaine dernière !"
- Ah ben Tino Rossi, c'est bien le seul truc que je
n'ai jamais collectionné.
- Mais c'est très bien Tino Rossi !
- Ah bon ?
- Ah ouiche ! Un vrai crooner d'avant-guerre, avec
beaucoup de charme !
- Eh bien, si tu veux des titres en 78 tours, je te
les trouve.
- Ah, je vois, monsieur est un Averty averti !
- Moi, Tino Rossi, JE NE PEUX PAS ! Déjà enfant
j'avais une dent contre lui...
- C'est parce que tu l'as vu vieux, quand il
chantait Petit Papa Noël...
- Non, non, c'est comme Claude François, je me
souviens de la joie secrète qui m'a envahie lorsque, encore gamine, j'ai entendu
à la radio : "Claude François est mort dans sa baignoire..."
- Faut pas ! Chez la plupart des artistes de
variété, même les plus caricaturaux, on peut trouver quelque chose qui
transcende leur médiocrité. Chez Claude François, il y avait une énergie
extraordinaire...
- Et alors ?
- Alors c'est une énergie qui est positive, saine,
agréable...
- Savez-vous que le jour où Claude François est
mort, c'était un jour d'élection ?
- Un jour d'érection ?
- Un jour d'é-LEC-tion, j'ai dit ! Et Libé avait
titré : "Claude François a volté !"
- C'est honteux !
- Oui... mais ça ne se rate pas !
- Moi je me souviens qu'on disait dans le lycée où
j'étais qu'il écoutait à la radio la chanson de Joe Dassin : "Tu me
fais de l'électricité".
- Joe Dassin !!! Voilà bien quelqu'un chez qui la
qualité tu peux la chercher longtemps.
- Tu as tort ! Dassin a produit quelques morceaux
merveilleux. Par exemple, son adaptation de l'Ode à Billie Joe !
- Absolument ! Et aussi Katie Cruel, très
très bien !
- Mais à côté de ça : les Dalton, les Petits
pains au chocolat...
- N'empêche qu'il avait un doctorat d'ethnologie ayant
pour thème la musique folklorique...
- C'est vrai ?
- Absolument ! Un doctorat passé à l'université du
Michigan au début des années soixante.
- Et puis il ne faut pas oublier qu'il était le fils
d'un immense artiste et qu'il a poussé dans un univers qui n'était pas nul...
- Sa mère n'était pas mal non plus...
- Ah bon ! Qui diable était sa mère ?
- Il y aurait donc une chose que tu ne sais pas ? C'était
la comédienne et femme politique grecque Mélina Mercouri, épouse de Jules
Dassin, réalisateur de Topkapi, Jamais le dimanche, Les Forbans de la
nuit...
- Ah ben merde ! Il y a vraiment de la
culture fulgurante dans cette librairie !
- Sachez que les auditeurs de France-Culture sont
tout à fait capables de vous pondre une thèse sur la famille Dassin !
Merci pour ce splendide compte rendu impressionniste, cher Bruno : ça suffit largement à restituer l'ambiance générale !
RépondreSupprimerMais hélas ma bécane ne me permet plus d'accéder à SoundCloud : serait-ce trop te demander que de déposer les fichiers chez MF et de communiquer les liens ?
Ici-même : https://www.mediafire.com/folder/5b8fb50r038fd//ANPéRo(s)
RépondreSupprimerUne belle ambiance ! Mais je regrette d'avoir raté La Chanson de Craonne interprétée par la chorale entropique !!!
Yourfa !
RépondreSupprimerMerci pour cette bénévolence et cette diligence, je m'en vas écouta fissa tout ça !
(Mais je ne me souviens pas d'une interprétation de La chanson de Craonne ce soir-là…)
Ah pardon, ce sont Les Silver d'Argent, Gabriel Yared et Schubert !
RépondreSupprimerJe croyais que tu avais mis quelques extraits sonores, tant pis !
Ce sont et ce sont ! Il faut écouter...
SupprimerElle est bonne celle-là. On garde la prise, on fera un enregistrement d'ambiance plus tard. Coupezzzzzzzzzzzzzzzzzzzz !
RépondreSupprimerBon à la place de Schubert, je propose Jerry Lee Lewis en 78 tours, puisque l'on en a parlé : https://www.wuala.com/78tours/Musique/?key=YRBIJvoUD50S
RépondreSupprimeret quatre portraits en N&B : le grand modérateur généreux et une éloquente dame :
https://www.flickr.com/photos/photogestion/sets/72157645086256704
Daniel
Il semble que je n'ai pas accès au compte Flicker
RépondreSupprimerMoi non plus : "Cette page est privée" (une question de droit à l'image, peut-être ??). En tout cas, merci à Daniel pour les très vieux Roooock 'n Rollll !
SupprimerExactement, et pour célébrer le temps récemment passé, et à venir sur la région parisienne, Laissons les quatre vents souffler (Let the four winds blow) avec l'excellent Fats Domino : Let the four winds blow, Fats Domino
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