Apostrophe (1975) |
Soljenitsyne : un nom et un visage sans doute parmi les plus connus de la littérature mondiale et même chez les moins lettrés de mes congénères. En tout cas, quiconque était gamin dans les années 70 a forcément en mémoire des images de ce déjà vieillard à longue barbe grise que l'on voyait, je ne dirais pas tout le temps, mais suffisamment souvent pour imprimer durablement nos rétines.
Ramené dans le contexte de la guerre froide, Soljenitsyne c'était le dissident par excellence, la figure de proue d'une Europe de l'Ouest toujours inquiète des agissements du Kremlin, aussi d'une France pompido-giscardienne si peu sûre d'elle-même qu'elle n'avait d'autre recours, pour vanter son modèle économique et social face au danger que représentait pour elle les communistes français, d'autre recours que faire appel à un nostalgique de la Russie des tsars pour dénoncer la Russie des soviets. Mouais, même si on tend un peu à l'oublier aujourd'hui, on vivait alors une époque assez trouble et paradoxale. Je me souviens par exemple du climat délétère qui régnait sur le plateau d'Apostrophe lorsque Soljenitsyne, entouré d'égards, en était l'invité d'honneur et que, sous couvert de littérature, l'émission se transformait quasiment en tribune politico-religieuse où la propagande réactionnaire de Soljenitsyne allait si bon train que l'inaltérable d'Ormesson, invité lui aussi, prenait presque figure de grand progressiste ! Mais ce dont je me souviens surtout, c'est d'un homme au regard un peu fuyant, d'un écrivain à l'air un peu hautain, faussement inspiré, pas franc du collier... et voilà sans doute pourquoi je n'ai jamais rien lu d'Alexandre Soljenitsyne.
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