On ne trouvera chez moi ni sapin, ni guirlandes, ni rien qui rappelle la Nativité, hormis ces quatre planches du dessinateur brésilien João Spacca de Oliveira, qu'il a lui-même traduites en français tout spécialement pour nous. C'est un cadeau ! Et mieux encore : une aimable pensée, un geste d'amitié, un petit message d'espoir venu d'outre-Atlantique... Joyeux Noël à tous !
Un rideau est baissé, mais l'activité se poursuit sous d'autres formes : ANPR, ANPéRo
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2014/12/24
2014/08/29
Márcio Souza : Le Brésilien Volant
« Je n'ai jamais travaillé
sérieusement sur une idée abstraite. J'ai perfectionné mes inventions grâce à
une série de tests étayés par le bon sens et l'expérience. »
(Santos-Dumont)
Autant le dire tout de suite, ce roman de Márcio Souza
sur les débuts de l'aviation ne vole ni très haut ni très loin, tout comme les premiers coucous du Brésilien
volant, alias Santos-Dumont, une star en son pays. Or, assez curieusement, l'auteur
nous prévient d'emblée qu'il ne l'apprécie
guère :
Ce récit est le scénario d'un film et ne se veut pas
la biographie définitive, officielle et incontestée de Santos-Dumont. A vrai
dire, je n'éprouvais pas au départ une grande sympathie pour le personnage. En
se l'appropriant, les militaires ont fait de Santos-dumont une figure insipide,
symbole d'un patriotisme médiocre et revanchard, typiquement brésilien, une
sorte de demi-dieu ridé et jaunâtre, malheureusement victime de l'injustice d'être
né sur cette terre du carnaval et de la bonhommie. Enfin, l'une de ces
histoires exemplaires que l'on ne cesse de nous seriner dans le simple but de
confirmer que nous sommes nés pour vaincre et non pour baisser les bras.
En vérité, ce patriotisme aveugle a fait subir à
Santos-Dumont bien pis que ce que les pigeons infligent d'ordinaire, sans la
moindre cérémonie, aux statues des grands hommes qui couvrent la place
publique.
Heureusement, les pigeons ne s'y trompent pas.
Déboulonner de son piédestal une icône nationale, je
n'ai rien contre, au contraire. D'ailleurs, l'Empereur d'Amazonie, du même
Márcio Souza, est une réussite d'humour et d'intelligence... Mais là, écrivant
l'histoire de quelqu'un qu'il n'aime pas, l'auteur force sans doute un peu son
talent pour noircir des pages dépourvues d'âme et de passion. De sorte qu'à
moins d'être férocement féru d'aviation, cette lecture est presque aussi
ennuyeuse qu'un vol long-courrier...
L'un des meilleurs chapitres :
Le capitaine Ferber est un homme maigre, très grand,
aux fines moustaches aussi lustrées que ses cheveux noirs séparés par une raie
au milieu. Il gravit les marches, escortant Mme d'Acosta, une dame aux traits
hispaniques, au corps svelte, richement parée, et une jeune femme au visage
très expressif, aux cheveux noirs, simplement vêtue de bleu ciel. La jeune
fille ne cache pas son mécontentement de se trouver en telle compagnie, mais la
dame ne cesse de pester.
- Quelle enfant sotte. Voyez comme elle est attifée,
on croirait une marchande de légumes du Bronx. C'est ridicule, avec toutes les
robes neuves qu'elle a !
- Ne soyez pas si sévère, ma chère madame. Mlle Aïda
ressemble à une fleur dans cette robe bleu ciel.
- Une fleur vulgaire... Voilà à quoi elle ressemble.
Et elle a déjà porté cette robe à deux réceptions. C'est impardonnable. On finira
par dire que nous sommes ruinées.
- Personne n'osera faire une telle remarque.
- Tu vois, maman. Personne ne va penser que nous
sommes ruinées. Affirmation du capitaine Ferber, qui s'y entend en catastrophes
financières.
- Impudente ! Mais est-ce que je m'adresse donc à
une étrangère ? Je ne sais pas quelle idée cette jeune fille se fait de la
vie...
Ils entrent dans le salon et sont accueillis par
leurs amphitryons, un couple d'âge mûr au regard clair et hautain, des êtres
manifestement coutumiers du pouvoir.
- Mon très cher comte de Bouvard. Et comment se
porte ma douce comtesse, toujours rayonnante, vous irradiez la vertu.
Ferber baise la main de la comtesse avec mille
grâces, une main aux doigts rutilant d'or et de diamants.
- Et qui sont ces charmantes dames qui vous
accompagnent, mon cher capitaine ?
- Permettez-moi de vous présenter : Mme d'Acosta et
sa fille Aïda. Le comte et la comtesse de Bouvard, dont le salon est le plus
prisé de Paris...
Tous échangent des politesses, mais Aïda reste
indifférente.
- Madame d'Acosta, mais bien sûr, dit le comte en
reconnaissant la millionnaire.
Bouvard attire Ferber à l'écart, de manière presque
indiscrète, tandis que Mme d'Acosta bavarde avec la comtesse sous le regard
irrité d'Aïda.
Le comte maintient le bras de Ferber; il semble
intrigué.
- Bien joué, ruffian !
- La petite n'a pas de prétendant. Le père est en
Hollande et j'ai plu à Madame. Cher ami, je suis sur le point de faire un
grands pas en avant...
- La reine du tabac de Cuba ! Sur dix cigares fumés
dans le monde civilisé, cinq proviennent de sa manufacture de Santiago.
- Elles possèdent une collection de fourrures qui,
mises bout à bout, recouvriraient la route d'ici au cap Ferrat.
- Des fourrures ? Pour l'été ? Il vous faudra
civiliser ces créatures, mon ami.
- Certainement, mon cher comte.
- Ce qui vous vaudra certaines récompenses...
matérielles...
Ferber se contente de sourire; son regard dépasse le
groupe des femmes qui bavardent pour se poser sur Aïda qui se tient à l'écart,
absente.
- Ah ! A propos, cette vieille dette de jeu...
- Ne me dites pas que vous allez la payer !
- D'ici peu, très peu de temps. Et avec les intérêts
!
Bouvard, incrédule, a un petit sourire.
- Dieux du ciel ! j'avais déjà perdu espoir.
- J'ai toujours cru à la générosité des familles
américaines.
Le maître d'hôtel annonce de nouveaux invités :
- Monsieur Alberto Santos-Dumont et Monsieur Georges
Goursat.
Les conversations cessent et une grande agitation
s'empare du salon. Les femmes poussent de petits cris et applaudissent quand le
petit monsieur élégant fait son entrée, la canne à la main, en compagnie d'un
autre homme, blond et fort. Alberto remercie; sa visible timidité désarme les
plus entreprenants qui, incapables de se maîtriser, ont accouru pour le voir de
près et même lui serrer la main.
Aïda, qui était jusqu'alors restée absente, a les
yeux fixés sur le nouvel arrivant. Lui ne manque pas de remarquer la jeune
fille qu l'observe d'un regard si pénétrant qu'Alberto aurait certainement déjà
pris feu s'il était inflammable. Alberto passe devant la jeune femme, la
regarde quelques secondes puis va aussitôt baiser la main de la comtesse de
Bouvard.
Cet événement inaccoutumé n'échappe pas à Sem et un
léger sourire ironique lui vient aux lèvres. Petitsantôs n'était donc pas aveugle,
ni le capitaine Ferber d'ailleurs, qui observe avec inquiétude les réactions
d'Aïda.
La vieille comtesse accueille ses hôtes célèbres
avec une joyeuse cordialité.
- Mon cher Petitsantôs, quel honneur. Je veux que
vous me racontiez tout ce que vous faites. Si vous saviez combien j'ai eu peur
que Monaco ne vous enlève à nous.
Petitsantôs entend à peine la comtesse.
- Monaco ?
- Mais oui, Monaco. Car enfin, le prince ne vous
a-t-il pas ouvert sa principauté pour que vous y installiez tous vos merveilleux
ballons ?
- Petitsantôs sait bien mal exprimer sa gratitude,
intervient Sem, railleur. Il n'a rien trouvé de mieux à faire que de précipiter
son altesse, le prince Albert, au fond d'une barque avec le guiderope de son
ballon...
- Doux Jésus ! Et qu'est-il arrivé au prince ? La
comtesse était anxieuse.
- Le prince n'a pas bien évalué le poids de la
corde, tente d'expliquer Petitsantôs, et il s'est fait traîner par le n°6.
- Le n°6 ?
- Le dirigeable !
- Plaît-il ?
- Hum...le... le ballon...
- Ah ! oui.
- A la deuxième tentative, il a été facile de
ramener le n°6 vers le quai puis au hangar. J'allais plus vite qu'il n'y
paraissait...
- Et le prince ?
- Quel prince ? demande Petitsantôs à la comtesse
déconcertée.
- En fait, répond Sem qui se retient à grand-peine
de rire, le dirigeable n°6 comptait plus pour Alberto que la santé du prince de
Monaco.
La comtesse de Bouvard considère Petitsantôs d'un
air ouvertement réprobateur.
- Je vois ! Petitsantôs n'aime pas les aristocrates
!
Márcio Souza : Le
Brésilien volant (1986)
Traduction de Lyne Strouc
(1990)
Aux Editions Belfond
Et puis Santos-Dumont c'est aussi l'occasion de
partager trois nouvelles planches de João Spacca, tirées d'une BD que vous ne
trouverez ni à l'Entropie, ni dans les rayons d'aucune autre librairie, mais
seulement auprès de l'auteur :
2014/01/12
Spacca : Jean-Baptiste Debret (BD historique)
En 2006, soit presque deux siècles après que
Jean-Baptiste Debret ait foulé pour la première fois le sol brésilien, João
SPACCA de Oliveira retraçait les aventures de l'artiste dans une bande dessinée
d'environ quarante pages où se combinent à la fois l'histoire et l'humour. Une
histoire peut-être insuffisamment détaillée, mais à laquelle ne manquent aucun des faits les plus marquants d'une époque croquées à grands coups de crayon
incisif. Sont particulièrement bien restitués l'esprit de cour, la
morgue des élites, les rivalités d'artistes et l'atmosphère ouvrieuse des rues de Rio, autrefois parcourues par l'un de nos compatriotes, entre deux cours
donnés à la toute neuve Académie des Beaux-Arts. Et c'est d'ailleurs
sur une évocation d'un élève de J.-B. Debret promis à un brillant avenir,
Manuel de Araújo Porto-Alegre, que s'achève ce Voyage en terre-dessinée.
Avec aussi une préface de l'historienne Elaine Dias,
des repères chronologiques, une petite galerie d’œuvres d'art, une bibliographie et,
pour finir, une richissime idée : le making-of de la BD.
Une pleine planche :
A 6h1/2 de l'après-midi du
26 mars 1816, les voyageurs foulent les quais de la Place du Palais.
Peu après, le canon annonce
la fermeture du port et, ding-dong ! les cloches sonnent l'heure de
l'Ave-Maria.
Jusqu'à 10h00 du soir, on
entend les appels des vendeurs de boissons et de sucreries :
Editeur : Companhia das Letras
2013/12/25
Parce que c'est aujourd'hui Noël : Le Verbe qui se Voit (Spacca)
Parce que c'est aujourd'hui Noël,
la librairie l'Entropie vous offre, avec l'aimable autorisation de João SPACCA
de Oliveira ©, ces quatre planches de BD librement adaptées du "Sermon de
la Naissance de l'Enfant-Dieu", par le Padre Antônio Vieira (1608-1697).
On trouvera sur le blog de l'auteur la BD dans sa version originale, ainsi que d'éclairants commentaires,
mais on ne trouvera qu'ici la traduction française effectuée par bibi, qui en a
d'ailleurs bavé des ronds de flan tellement sont impénétrables et alambiquées
les paroles du Seigneur... Joyeux Noël à tous ! Feliz Natal a todos !!
2013/09/28
Spacca : Jubiabá (BD)
Arrivée en banlieue parisienne trois semaines jour pour jour après avoir
été glissée dans une boîte postale de la banlieue de São-Paulo, cette BD a
parcouru 9500km, franchi deux océans et traversé sept méridiens à la vitesse
éclair de 19 kilomètres à l'heure, sans doute un record dans le genre, mais ce
n'est pas la raison pour laquelle on en va parler.
Introuvable en France, et pas même disponible sur le Web, Jubiabá m'a donc
été envoyée par l'auteur, João Spacca de Oliveira, lequel a répondu à ma
demande à la façon des brésiliens : avec amabilité, obligeance et simplicité.
Merci à lui, ou muito obrigado, comme on dit là-bas.
Ceci étant, il ne faudrait pas croire qu'un excès de complaisance pour
l'auteur, voire même de sympathie pour l'homme, m'incite à louer ici son
adaptation du livre éponyme de Jorge Amado. Chacun pourra en effet juger un peu
plus bas de la qualité graphique de ses dessins ou de l'harmonie de ses couleurs
: un régal pour les yeux. Concernant le scénario, nécessairement condensé, il
est aussi fidèle que possible à l'original : on y retrouve non seulement chaque
épisode de la vie mouvementée d'Antonio Balduino, mais aussi la plupart des
personnages du roman et les multiples endroits qu'ils fréquentent. Enfin, et
c'est peut-être là le plus important : la sensibilité avec laquelle Spacca a su
retranscrire l'univers d'Amado, ce mélange de violence et d'amour dans le Brésil
des années vingt et trente, aussi ce constant souci du bien et du mal, et cet
espoir de voir poindre un jour des lendemains qui chantent. Au fond, tout bien
pesé et tout bien réfléchi, peu importe le talent des uns ou le génie des
autres... mais que l'humanité d'un homme fasse écho à celle d'un autre homme à
travers le temps et l'espace, voilà, oui voilà ce qui est vraiment beau.

~o~O~o~O~o~
Le petit Antonio Balduino, ici avec Zé-la-Crevette,
son professeur de guitare et de capoeira :
![]() |
© Spacca - 2009 |
Celui
qu'on appelle Jubiabá, guérisseur et maître de cérémonies Candomblé :
![]() |
"Son oeil de piété est parti. Seul est resté celui de la méchanceté." |
Après
l'internement de sa tante, Baldo est conduit par mame Augusta dans la maison du
conseiller Pereira :
![]() |
© Spacca |
Il y
rencontre Lindinalva, la fille du conseiller, l'amour de sa vie, la fièvre de
ses nuits... un rêve inaccessible :
Mal-aimé dans son nouveau foyer, Baldo fugue avant qu'on ne le chasse. Il découvre alors la liberté de la rue et les moyens d'y survivre avec la fine fleur des pavés : Zé-la-Cosse, Le-Gros, Viriato-le-Nain, Philippe-le-Beau et Rozendo :
![]() |
© Spacca |
Une fuite éperdue à travers la forêt :
![]() |
© Spacca |
Et finalement la prise de conscience, juste avant l'engagement politique :
-Les ouvriers sont une immense majorité dans le monde et les riches une petite minorité. Alors pourquoi les riches sucent la sueur des pauvres? Pourquoi cette majorité travaille stupidement pour le confort d'une minorité? Tous les ouvriers, les intellectuels pauvres, les paysans et les soldats doivent s'unir contre le Capital...
-Que signifie être contre le Capital ?
-"Capital" et "Riches" ça veut dire la même chose...
-Ah, alors je suis contre aussi...
Jubiabá (Bahia de tous les saints), 96 pages parues aux Ed. Quadrinhos na Cia, en 2009.
Illustrations et adaptation de Spacca ©, d'après l'oeuvre de Jorge Amado.
Les maisons Casterman, Dargaud, Dupuis, Delcourt ou Glénat sont priées de contacter urgemment les Editions Schwarcz LTDA, à São Paulo, afin de récupérer les droits de cette bande dessinée pour la mettre à disposition du public français, lequel leur vouera alors une reconnaissance éternelle :
![]() |
© Spacca |
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