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2014/12/24

Spacca : Feliz natal e ótimo 2015 (BD)

On ne trouvera chez moi ni sapin, ni guirlandes, ni rien qui rappelle la Nativité, hormis ces quatre planches du dessinateur brésilien João Spacca de Oliveira, qu'il a lui-même traduites en français tout spécialement pour nous. C'est un cadeau ! Et mieux encore : une aimable pensée, un geste d'amitié, un petit message d'espoir venu d'outre-Atlantique... Joyeux Noël à tous !





2014/08/29

Márcio Souza : Le Brésilien Volant

« Je n'ai jamais travaillé sérieusement sur une idée abstraite. J'ai perfectionné mes inventions grâce à une série de tests étayés par le bon sens et l'expérience. » (Santos-Dumont)

Autant le dire tout de suite, ce roman de Márcio Souza sur les débuts de l'aviation ne vole ni très haut ni très loin, tout comme les premiers coucous du Brésilien volant, alias Santos-Dumont, une star en son pays. Or, assez curieusement, l'auteur nous prévient d'emblée qu'il  ne l'apprécie guère :

Ce récit est le scénario d'un film et ne se veut pas la biographie définitive, officielle et incontestée de Santos-Dumont. A vrai dire, je n'éprouvais pas au départ une grande sympathie pour le personnage. En se l'appropriant, les militaires ont fait de Santos-dumont une figure insipide, symbole d'un patriotisme médiocre et revanchard, typiquement brésilien, une sorte de demi-dieu ridé et jaunâtre, malheureusement victime de l'injustice d'être né sur cette terre du carnaval et de la bonhommie. Enfin, l'une de ces histoires exemplaires que l'on ne cesse de nous seriner dans le simple but de confirmer que nous sommes nés pour vaincre et non pour baisser les bras.
En vérité, ce patriotisme aveugle a fait subir à Santos-Dumont bien pis que ce que les pigeons infligent d'ordinaire, sans la moindre cérémonie, aux statues des grands hommes qui couvrent la place publique.
Heureusement, les pigeons ne s'y trompent pas.

Déboulonner de son piédestal une icône nationale, je n'ai rien contre, au contraire. D'ailleurs, l'Empereur d'Amazonie, du même Márcio Souza, est une réussite d'humour et d'intelligence... Mais là, écrivant l'histoire de quelqu'un qu'il n'aime pas, l'auteur force sans doute un peu son talent pour noircir des pages dépourvues d'âme et de passion. De sorte qu'à moins d'être férocement féru d'aviation, cette lecture est presque aussi ennuyeuse qu'un vol long-courrier...

L'un des meilleurs chapitres :

Le capitaine Ferber est un homme maigre, très grand, aux fines moustaches aussi lustrées que ses cheveux noirs séparés par une raie au milieu. Il gravit les marches, escortant Mme d'Acosta, une dame aux traits hispaniques, au corps svelte, richement parée, et une jeune femme au visage très expressif, aux cheveux noirs, simplement vêtue de bleu ciel. La jeune fille ne cache pas son mécontentement de se trouver en telle compagnie, mais la dame ne cesse de pester.
- Quelle enfant sotte. Voyez comme elle est attifée, on croirait une marchande de légumes du Bronx. C'est ridicule, avec toutes les robes neuves qu'elle a !
- Ne soyez pas si sévère, ma chère madame. Mlle Aïda ressemble à une fleur dans cette robe bleu ciel.
- Une fleur vulgaire... Voilà à quoi elle ressemble. Et elle a déjà porté cette robe à deux réceptions. C'est impardonnable. On finira par dire que nous sommes ruinées.
- Personne n'osera faire une telle remarque.
- Tu vois, maman. Personne ne va penser que nous sommes ruinées. Affirmation du capitaine Ferber, qui s'y entend en catastrophes financières.
- Impudente ! Mais est-ce que je m'adresse donc à une étrangère ? Je ne sais pas quelle idée cette jeune fille se fait de la vie...
Ils entrent dans le salon et sont accueillis par leurs amphitryons, un couple d'âge mûr au regard clair et hautain, des êtres manifestement coutumiers du pouvoir.
- Mon très cher comte de Bouvard. Et comment se porte ma douce comtesse, toujours rayonnante, vous irradiez la vertu.
Ferber baise la main de la comtesse avec mille grâces, une main aux doigts rutilant d'or et de diamants.
- Et qui sont ces charmantes dames qui vous accompagnent, mon cher capitaine ?
- Permettez-moi de vous présenter : Mme d'Acosta et sa fille Aïda. Le comte et la comtesse de Bouvard, dont le salon est le plus prisé de Paris...
Tous échangent des politesses, mais Aïda reste indifférente.
- Madame d'Acosta, mais bien sûr, dit le comte en reconnaissant la millionnaire.
Bouvard attire Ferber à l'écart, de manière presque indiscrète, tandis que Mme d'Acosta bavarde avec la comtesse sous le regard irrité d'Aïda.
Le comte maintient le bras de Ferber; il semble intrigué.
- Bien joué, ruffian !
- La petite n'a pas de prétendant. Le père est en Hollande et j'ai plu à Madame. Cher ami, je suis sur le point de faire un grands pas en avant...
- La reine du tabac de Cuba ! Sur dix cigares fumés dans le monde civilisé, cinq proviennent de sa manufacture de Santiago.
- Elles possèdent une collection de fourrures qui, mises bout à bout, recouvriraient la route d'ici au cap Ferrat.
- Des fourrures ? Pour l'été ? Il vous faudra civiliser ces créatures, mon ami.
- Certainement, mon cher comte.
- Ce qui vous vaudra certaines récompenses... matérielles...
Ferber se contente de sourire; son regard dépasse le groupe des femmes qui bavardent pour se poser sur Aïda qui se tient à l'écart, absente.
- Ah ! A propos, cette vieille dette de jeu...
- Ne me dites pas que vous allez la payer !
- D'ici peu, très peu de temps. Et avec les intérêts !
Bouvard, incrédule, a un petit sourire.
- Dieux du ciel ! j'avais déjà perdu espoir.
- J'ai toujours cru à la générosité des familles américaines.
Le maître d'hôtel annonce de nouveaux invités :
- Monsieur Alberto Santos-Dumont et Monsieur Georges Goursat.
Les conversations cessent et une grande agitation s'empare du salon. Les femmes poussent de petits cris et applaudissent quand le petit monsieur élégant fait son entrée, la canne à la main, en compagnie d'un autre homme, blond et fort. Alberto remercie; sa visible timidité désarme les plus entreprenants qui, incapables de se maîtriser, ont accouru pour le voir de près et même lui serrer la main.
Aïda, qui était jusqu'alors restée absente, a les yeux fixés sur le nouvel arrivant. Lui ne manque pas de remarquer la jeune fille qu l'observe d'un regard si pénétrant qu'Alberto aurait certainement déjà pris feu s'il était inflammable. Alberto passe devant la jeune femme, la regarde quelques secondes puis va aussitôt baiser la main de la comtesse de Bouvard.
Cet événement inaccoutumé n'échappe pas à Sem et un léger sourire ironique lui vient aux lèvres. Petitsantôs n'était donc pas aveugle, ni le capitaine Ferber d'ailleurs, qui observe avec inquiétude les réactions d'Aïda.
La vieille comtesse accueille ses hôtes célèbres avec une joyeuse cordialité.
- Mon cher Petitsantôs, quel honneur. Je veux que vous me racontiez tout ce que vous faites. Si vous saviez combien j'ai eu peur que Monaco ne vous enlève à nous.
Petitsantôs entend à peine la comtesse.
- Monaco ?
- Mais oui, Monaco. Car enfin, le prince ne vous a-t-il pas ouvert sa principauté pour que vous y installiez tous vos merveilleux ballons ?
- Petitsantôs sait bien mal exprimer sa gratitude, intervient Sem, railleur. Il n'a rien trouvé de mieux à faire que de précipiter son altesse, le prince Albert, au fond d'une barque avec le guiderope de son ballon...
- Doux Jésus ! Et qu'est-il arrivé au prince ? La comtesse était anxieuse.
- Le prince n'a pas bien évalué le poids de la corde, tente d'expliquer Petitsantôs, et il s'est fait traîner par le n°6.
- Le n°6 ?
- Le dirigeable !
- Plaît-il ?
- Hum...le... le ballon...
- Ah ! oui.
- A la deuxième tentative, il a été facile de ramener le n°6 vers le quai puis au hangar. J'allais plus vite qu'il n'y paraissait...
- Et le prince ?
- Quel prince ? demande Petitsantôs à la comtesse déconcertée.
- En fait, répond Sem qui se retient à grand-peine de rire, le dirigeable n°6 comptait plus pour Alberto que la santé du prince de Monaco.
La comtesse de Bouvard considère Petitsantôs d'un air ouvertement réprobateur.
- Je vois ! Petitsantôs n'aime pas les aristocrates !

Márcio Souza : Le Brésilien volant (1986)
Traduction de Lyne Strouc (1990)
Aux Editions Belfond

Et puis Santos-Dumont c'est aussi l'occasion de partager trois nouvelles planches de João Spacca, tirées d'une BD que vous ne trouverez ni à l'Entropie, ni dans les rayons d'aucune autre librairie, mais seulement auprès de l'auteur :



2014/01/12

Spacca : Jean-Baptiste Debret (BD historique)

En 2006, soit presque deux siècles après que Jean-Baptiste Debret ait foulé pour la première fois le sol brésilien, João SPACCA de Oliveira retraçait les aventures de l'artiste dans une bande dessinée d'environ quarante pages où se combinent à la fois l'histoire et l'humour. Une histoire peut-être insuffisamment détaillée, mais à laquelle ne manquent aucun des faits les plus marquants d'une époque croquées à grands coups de crayon incisif. Sont particulièrement bien restitués l'esprit de cour, la morgue des élites, les rivalités d'artistes et l'atmosphère ouvrieuse des rues de Rio, autrefois parcourues par l'un de nos compatriotes, entre deux cours donnés à la toute neuve Académie des Beaux-Arts. Et c'est d'ailleurs sur une évocation d'un élève de J.-B. Debret promis à un brillant avenir, Manuel de Araújo Porto-Alegre, que s'achève ce Voyage en terre-dessinée.

Avec aussi une préface de l'historienne Elaine Dias, des repères chronologiques, une petite galerie d’œuvres d'art, une bibliographie et, pour finir, une richissime idée : le making-of de la BD.

Un montage :



Une pleine planche :
 A 6h1/2 de l'après-midi du 26 mars 1816, les voyageurs foulent les quais de la Place du Palais.
Peu après, le canon annonce la fermeture du port et, ding-dong ! les cloches sonnent l'heure de l'Ave-Maria.
Jusqu'à 10h00 du soir, on entend les appels des vendeurs de boissons et de sucreries :
" Brioche ! Eau fraîche ! Maïs frit, monsieur ? " 


Et un extrait du making-of :



Debret em Viagem Histórica e Quadrinhesca ao Brasil, by Spacca ©

2013/12/25

Parce que c'est aujourd'hui Noël : Le Verbe qui se Voit (Spacca)

Parce que c'est aujourd'hui Noël, la librairie l'Entropie vous offre, avec l'aimable autorisation de João SPACCA de Oliveira ©, ces quatre planches de BD librement adaptées du "Sermon de la Naissance de l'Enfant-Dieu", par le Padre Antônio Vieira (1608-1697).
On trouvera sur le blog de l'auteur la BD dans sa version originale, ainsi que d'éclairants commentaires, mais on ne trouvera qu'ici la traduction française effectuée par bibi, qui en a d'ailleurs bavé des ronds de flan tellement sont impénétrables et alambiquées les paroles du Seigneur... Joyeux Noël à tous ! Feliz Natal a todos !!





2013/09/28

Spacca : Jubiabá (BD)

Arrivée en banlieue parisienne trois semaines jour pour jour après avoir été glissée dans une boîte postale de la banlieue de São-Paulo, cette BD a parcouru 9500km, franchi deux océans et traversé sept méridiens à la vitesse éclair de 19 kilomètres à l'heure, sans doute un record dans le genre, mais ce n'est pas la raison pour laquelle on en va parler.
Introuvable en France, et pas même disponible sur le Web, Jubiabá m'a donc été envoyée par l'auteur, João Spacca de Oliveira, lequel a répondu à ma demande à la façon des brésiliens : avec amabilité, obligeance et simplicité. Merci à lui, ou muito obrigado, comme on dit là-bas.
Ceci étant, il ne faudrait pas croire qu'un excès de complaisance pour l'auteur, voire même de sympathie pour l'homme, m'incite à louer ici son adaptation du livre éponyme de Jorge Amado. Chacun pourra en effet juger un peu plus bas de la qualité graphique de ses dessins ou de l'harmonie de ses couleurs : un régal pour les yeux. Concernant le scénario, nécessairement condensé, il est aussi fidèle que possible à l'original : on y retrouve non seulement chaque épisode de la vie mouvementée d'Antonio Balduino, mais aussi la plupart des personnages du roman et les multiples endroits qu'ils fréquentent. Enfin, et c'est peut-être là le plus important : la sensibilité avec laquelle Spacca a su retranscrire l'univers d'Amado, ce mélange de violence et d'amour dans le Brésil des années vingt et trente, aussi ce constant souci du bien et du mal, et cet espoir de voir poindre un jour des lendemains qui chantent. Au fond, tout bien pesé et tout bien réfléchi, peu importe le talent des uns ou le génie des autres... mais que l'humanité d'un homme fasse écho à celle d'un autre homme à travers le temps et l'espace, voilà, oui voilà ce qui est vraiment beau.

Précisons encore que João Spacca de Oliveira a consacré à cet ouvrage un an et  demi de sa vie, dont six mois de recherches et de préparation, plus douze autres mois pour dessiner et colorier chacune des 81 planches ; qu'il s'est inspiré, entre autres choses, des magnifiques photos du français Pierre Verger et des chansons de Dorival Caymmi, célèbre auteur-compositeur de saudades, l'équivalent des fados portugais ; aussi que nous espérons vivre assez vieux pour voir fleurir un jour Jubiabá dans les bacs des librairies françaises ; et enfin qu'il a été extrêmement difficile de choisir quelles planches ou vignettes offrir en partage, tant elles sont presque toutes réussies, hormis quelques-unes peut-être un peu bâclées... Um abraço.
~o~O~o~O~o~

Le petit Antonio Balduino, ici avec Zé-la-Crevette, son professeur de guitare et de capoeira : 

© Spacca - 2009

Celui qu'on appelle Jubiabá, guérisseur et maître de cérémonies Candomblé :

"Son oeil de piété est parti. Seul est resté celui de la méchanceté."
      
Après l'internement de sa tante, Baldo est conduit par mame Augusta dans la maison du conseiller Pereira :

© Spacca

Il y rencontre Lindinalva, la fille du conseiller, l'amour de sa vie, la fièvre de ses nuits... un rêve inaccessible : 

"Après avoir reçu une terrible raclée, ce n'était pas le corps d'Antonio Balduino
qui souffrait. C'était surtout le cœur qui lui faisait mal, parce qu'ils n'avaient
pas confiance en lui. Et il engloba ces Blancs, qu'il appréciait jusqu'alors, dans
la haine qu'il portait à tous les autres."









Mal-aimé dans son nouveau foyer, Baldo fugue avant qu'on ne le chasse. Il découvre alors la liberté de la rue et les moyens d'y survivre avec la fine fleur des pavés : Zé-la-Cosse, Le-Gros, Viriato-le-Nain, Philippe-le-Beau et Rozendo :
© Spacca


Un peu plus tard, la vie du champion connaît des hauts et des bas :

© Spacca


Avec de la violence policière en veux-tu en voilà :

© Spacca


Aussi des rires et des larmes :

© Spacca


Une fuite éperdue à travers la forêt :

© Spacca

Et finalement la prise de conscience, juste avant l'engagement politique :

Traduction :

-Les ouvriers sont une immense majorité dans le monde et les riches une petite minorité. Alors pourquoi les riches sucent la sueur des pauvres? Pourquoi cette majorité travaille stupidement pour le confort d'une minorité? Tous les ouvriers, les intellectuels pauvres, les paysans et les soldats doivent s'unir contre le Capital...
-Que signifie être contre le Capital ?
-"Capital" et "Riches" ça veut dire la même chose...
-Ah, alors je suis contre aussi...

Jubiabá (Bahia de tous les saints), 96 pages parues aux Ed. Quadrinhos na Cia, en 2009. 
Illustrations et adaptation de Spacca ©, d'après l'oeuvre de Jorge Amado.

Les maisons Casterman, Dargaud, Dupuis, Delcourt ou Glénat sont priées de contacter urgemment les Editions Schwarcz LTDA, à São Paulo, afin de récupérer les droits de cette bande dessinée pour la mettre à disposition du public français, lequel leur vouera alors une reconnaissance éternelle : 

© Spacca